TENSIONS PRÉ-ÉLECTORALES AU SÉNÉGAL: OUSMANE SONKO ASSIGNÉ À RÉSIDENCE.

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Des scènes de violence ont éclaté e vendredi à Dakar entre des jeunes et la police sénégalaise tandis que le leader de l’opposition Ousmane Sonko était bloqué chez lui après son appel à défier une interdiction de manifester, signes d’un climat de plus en plus tendu à l’approche des législatives de fin juillet.

Des groupes de jeunes qui lançaient des cailloux ont été repoussés dans l’après-midi par des grenades lacrymogènes et assourdissantes tirées par la police antiémeute près de la place de la Nation où était prévue la manifestation, ont constaté des journalistes de l’AFP.

L’immense esplanade, habituellement noire de monde, était déserte, à l’exception d’un important dispositif policier. Tous les magasins avaient tiré le rideau et personne ne pouvait approcher.

« Les policiers empêchent les gens de se rassembler et font respecter les ordres du préfet. Pour l’instant ça a l’air sous contrôle. Mais ce qui va se passer après, on n’en sait rien », a déclaré à l’AFP Bamba Diop, 30 ans, alors que des détonations étaient entendues à distance.

A la mi-journée, les policiers ont empêché M. Sonko de se rendre à la prière du vendredi, tandis que de premiers troubles étaient rapportés sur les réseaux sociaux, des jeunes qui ont incendié des pneus et attaqué du mobilier urbain sur un important axe routier de la capitale.

« Même notre liberté de culte est bafouée aujourd’hui. Les forces de l’ordre m’ont dit qu’elles ont reçu l’ordre de ne pas me laisser sortir », a dit posément M. Sonko, vêtu du boubou traditionnel pour la prière, après s’être heurté à un barrage de policiers, à qui il a dit ne pas en vouloir.

Le pouvoir cède à la « panique », avait-assuré plus tôt M. Sonko, troisième de la présidentielle de 2019, candidat déclaré à celle de 2024 et personnalité populaire chez les jeunes.

L’opposition a appelé à manifester vendredi après-midi contre l’invalidation d’une liste nationale de candidats aux législatives du 31 juillet, et plus largement contre le pouvoir.

Cette invalidation écarte de la compétition M. Sonko et certaines figures d’opposition.

Le préfet a interdit la manifestation en invoquant les « menaces de troubles à l’ordre public ». M. Sonko et les chefs de sa coalition ont annoncé leur intention de braver l’arrêté et appelé à manifester massivement.

« La manifestation est maintenue, elle aura bel et bien lieu », a assuré à l’AFP Ousseynou Ly, porte-parole du parti de M. Sonko, le Pastef.

De nombreuses voix se sont élevées pour appeler au dialogue face au risque de violences semblables aux émeutes qui, en mars 2021, avaient fait une douzaine de morts dans le pays.

– « Le Conseil a décidé » –

Mais le pouvoir et l’opposition n’ont donné aucun signe de vouloir transiger et les analystes décrivent généralement une impasse politique.

L’opposition dénonce l’invalidation de la liste nationale de la coalition Yewwi Askan Wi, menée par le parti de M. Sonko, comme un stratagème du président Macky Sall pour écarter ses adversaires sous couvert de moyens légaux.

Le ministère de l’Intérieur a justifié cette décision en invoquant l’inéligibilité d’une de ses candidates, qui figure par inadvertance à la fois parmi les titulaires et les suppléants. Le Conseil constitutionnel a confirmé.

L’opposition a menacé d’empêcher la tenue des élections si Yewwi Askan Wi n’y participe pas. En fait, Yewwi peut toujours concourir, mais pas M. Sonko.

Les Sénégalais élisent leurs 150 députés selon un mode qui panache scrutin proportionnel, avec des listes nationales pour 53 parlementaires, et scrutin majoritaire dans les départements pour 97 autres. La diaspora élit 15 députés.

C’est la liste nationale des titulaires de Yewwi qui est rejetée. Mais la coalition peut participer avec la liste des suppléants et avec ses candidats dans les départements.

Le président Sall a fermé la porte à un repêchage de la liste invalidée. « De toute façon, le pays va faire ces élections, le Conseil constitutionnel a décidé », a-t-il déclaré.

La mise en cause de M. Sonko par la justice dans une affaire de viols présumés avait contribué en mars 2021 à plusieurs jours d’émeutes, de pillages et de destructions.

Deux autres adversaires du président, l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall (sans lien de parenté avec Macky Sall) et l’ancien ministre Karim Wade, fils d’ex-président, ont vu leur trajectoire interrompue par les ennuis judiciaires.

Le pouvoir se défend de toute instrumentalisation de l’appareil d’Etat.

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